Pour la directrice des ressources humaines Orange, au sein de l’Agence Entreprise Rhône Méditerranée, Florence Boughanem, la cohabitation de salariés de droit privé et des fonctionnaires est un élément de la dynamique de l’entreprise. Dans un secteur en mouvement perpétuel, Orange doit s’adapter pour ne pas mourir tout en privilégiant un management de proximité auprès de ses salariés.
A Orange, vous êtes vous-même toujours liée à un statut de fonctionnaire dans une entreprise dont le statut est privé. Comment cohabitent les deux typologies d’emploi au sein de l’entreprise ?
Effectivement, je suis fonctionnaire depuis mon entrée à France Telecom en 1992, après avoir passé un concours externe. 25 ans après mon intégration dans le groupe, qui s’appelle désormais Orange, je gère un portefeuille de salariés aux nombreux statuts. Du fait de notre histoire, de notre culture et des nombreux changements que nous avons dû conduire, nous avons recruté des salariés aux parcours variés. Fonctionnaires, détachés, CDI, CDD, alternants, … cohabitent très bien et font la richesse de nos équipes. Il faut vraiment avoir l’œil d’une responsable RH pour distinguer chez nous fonctionnaires et salariés contractuels de droit privé. Nos accords d’entreprise visent l’équité de traitement entre statuts. Que ce soit sur le temps, l’organisation et les modes de travail, la rétribution, la reconnaissance des compétences et des qualifications, nos accords ne font pas de distinction de fond entre les fonctionnaires et les contractuels. Seul le « contrat » de départ et certaines règles de gestion individuelle (congés maladie, retraites, …) diffèrent.
Comment initier une réorganisation de travail, dans un secteur comme le vôtre où l’adaptation au changement est une nécessité pour survivre face à la concurrence ?
En effet, le changement est notre quotidien dans un secteur d’activité porteur, qui se livre à une guerre des prix permanente et rivalise d’offres commerciales, confronté à une régulation du marché très prégnante et des innovations technologiques et digitales permanentes. Notre ligne managériale privilégie la gestion stratégique de l’emploi et de nos compétences. Anticiper les recrutements pour permettre le transfert de l’expertise, en misant sur nos salariés confirmés sur le départ (temps partiel sénior ou retraite) vers nos nouvelles recrues plus jeunes, plus digitales. Nous misons aussi sur l’organisation apprenante qui, au-delà des formations initiales, met l’accent en permanence sur le tutorat, le partage de pratiques en ateliers, le mentoring (Ndlr, relation interpersonnelle de soutien) et le reverse mentoring, l’entraide au sein des équipes, etc. Autre point : nous ajustons en permanence les ressources en fonction de l’activité et de la charge de travail. Enfin, on parle beaucoup de télétravail : 17 % des salariés au sein de mon unité y ont recours, sans compter le télétravail occasionnel, très répandu.
Après le terrible épisode des suicides à France Télécom entre 2008 et 2009, comment l’entreprise a-t-elle repris la main ? Et pourquoi cette anticipation du risque n’avait-elle pas été possible avant ?
Le nouveau PDG Stéphane Richard a su redonner confiance à ses cadres dirigeants, ses managers de proximité, ses salariés. D’abord à travers ce que nous avons appelé les Assises de la refondation puis la démarche Conquêtes 2015. Enfin, Essentiels 2020 a permis de décliner des projets d’unité et d’équipe au plus près du terrain. Au final, nos salariés se sont approprié la stratégie de l’entreprise, comme l’indique notre baromètre social. En 2010, Orange a signé un nouveau contrat social en prenant des engagements forts : pas de plan social, plans de recrutements externes et alternants, mobilité sur volontariat, renforcement des RH de proximité, accompagnement des managers, etc. En 2016, Orange s’est engagée à être un employeur digital et humain en retenant trois axes : garantir les compétences de demain, développer l’agilité collective, favoriser l’engagement des salariés. Les managers ont été mieux impliqués à travers un accompagnement renforcé : Orange Campus, certifications, coaching, co-développement, mentoring. Enfin, des dispositifs ont été mis en place pour mieux remonter les préoccupations des salariés dans le cadre d’un management beaucoup plus participatif s’inspirant des fondements de l’entreprise libérée.
Propos recueillis par Stéphane Menu

